vendredi 1 novembre 2013

Textes lus lors de notre 26ème veillée - 1er novembre 2013

Si vous le souhaitez, vous pouvez lire notre page en écoutant de la musique
(fichier téléchargeable)

Card. André Vingt-Trois, « Adresser les avertissements de Dieu » (8 octobre 2013) (extraits)
Jean de Baulhoo, « Fable pour les enfants en hommage aux veilleurs » (octobre 2013)
Axel Nørgaard Rokvam, « L'homme libre est celui qui écoute sa conscience » (7-8 octobre 2013)

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Cardinal André Vingt-Trois : « Adresser les avertissements de Dieu » (extraits de l'homélie prononcée lors de la messe pour les responsables politiques et les parlementaires en la basilique Sainte-Clotilde, le mardi 8 octobre 2013).

(...) Pour un certain nombre de nos contemporains, (les croyances et les religions) sont considérées comme des instances chargées de rappeler des principes moraux. Au nom de la laïcité, on accepte qu’elles se fassent entendre, mais sans aller jusqu’à prendre en compte leurs observations. Elles seraient comme l’ornementation éthique de décisions qui n’intègrent pas réellement les références éthiques. Comme si la seule référence morale était de se modeler sur les comportements existants, y compris avec leurs contradictions, et de les rendre licites par la loi.

Je ne sais pas si notre société peut être comparée à Ninive, la grande ville païenne. Mais ce que l’Écriture veut nous dire, à coup sûr, c’est que, malgré ses réticences et ses craintes, Jonas est envoyé pour appeler cette ville à corriger ses mœurs. (...) L’épisode qui nous est relaté (...) est un message d’espérance. Même une ville aussi grande et corrompue que Ninive ne reste pas sourde aux avertissements du prophète. Si éloignée que notre société nous paraisse de la foi et de la Parole de Dieu, nous ne pouvons pas nous récuser en arguant du fait que les croyants et spécialement les chrétiens ne dominent pas la société et que nous ne serions pas écoutés. À cette société, comme à Ninive, nous sommes invités à adresser les avertissements que Dieu nous inspire, respectant la liberté personnelle de chacun pour les accueillir ou pour les réfuter, pour les suivre ou pour s’en détourner.

Je ne voudrais pas dresser maintenant un catalogue des questions sur lesquelles la Parole de Dieu doit nous interpeller. Mais les temps que nous vivons nous invitent à une plus grande vigilance dans plusieurs domaines dans lesquels le travail législatif est gravement impliqué. Le premier de tous est évidemment la manière de penser et de mettre en œuvre la solidarité nationale. Il est normal que des orientations politiques divergent sur les moyens à promouvoir. Il est d’autant plus important que les objectifs de la solidarité soient clairement exprimés et rappelés. Est-il possible de progresser dans ce domaine sans affronter les avantages catégoriels, sans reconnaître que la consommation ne peut pas être le seul levier du dynamisme économique et social ? Avons-nous assez de courage pour affronter cette réalité dans les débats électoraux ?

Une autre question mérite toute notre attention, le sort réservé aux enfants dans notre société. Dans beaucoup des débats que nous avons connus au cours de l’année écoulée et qui reviendront dans les mois qui viennent, on dissimule à peine la tendance lourde qui consiste à considérer l’enfant exclusivement du point de vue des désirs de l’adulte qu’il est supposé satisfaire. On l’a vu dans l’exclusion du pôle paternel ou maternel lors du vote de la loi sur l’ouverture du mariage aux personnes de même sexe. On va le revoir dans le débat sur l’ouverture de l’assistance médicale à la procréation. Je ne doute pas que, pour un certain nombre de personnes, il s’agit d’affronter une souffrance réelle. Mais je doute que l’on prenne en compte le bien supérieur de l’enfant.

Dans ce domaine, comme dans celui de la gestion de la fin de la vie, nous souhaitons simplement répéter ce qui devrait être un repère commun dans notre société : le respect de la dignité de toute personne humaine dont aucune ne devrait pouvoir imaginer qu’on dispose de sa vie en fonction de nos propres désirs, de nos sentiments ou de notre souffrance. (...)

Enfin, comment pourrions-nous oublier la situation des communautés chrétiennes du Moyen-Orient. Le ministre des Affaires étrangères a récemment rappelé devant l’Assemblée nationale la responsabilité particulière de la France à leur égard, responsabilité historique et actuelle. Cette responsabilité peut s’exercer en accueillant largement les réfugiés. Mais elle doit surtout s’exercer par notre action diplomatique pour faire respecter les droits dans des pays où ils vivent depuis le début de l’ère chrétienne et leur permettre ainsi de rester paisiblement dans leur patrie. En tout cas, cet objectif nous oblige à une grande attention dans l’aide militaire et diplomatique que nous pourrions apporter à des groupes dont la conviction sur ce point serait sujette à caution. (...)

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FABLE POUR LES ENFANTS EN HOMMAGE AUX VEILLEURS

Le Bon Dieu, le grand Dieu,
Tout là-haut dans les cieux,
Celui devant lequel
On s’agenouille au ciel ;

Celui des jeunes, des vieux,
Riches ou nécessiteux ;
Lui le Père éternel,
Pour sa forme charnelle

Descendre sur la terre,
Sauver les pauvres hères,
Avait choisi Jésus,
Fils de Dieu, il le fut ;

Engendré par le Père,
Avec Marie pour mère,
Le Seigneur s’aperçut
Alors un peu confus,

Qu’il fallait pour l’enfant,
Toujours une maman ;
Un papa de surcroît,
Il n’avait pas le choix.

Il trouva dans l’instant,
Malgré le poids des ans,
Un homme honnête et droit,
De la lignée d’un roi.

Copyright Jean de Baulhoo, octobre 2013

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Axel : « L’homme libre est celui qui écoute sa conscience »

Le mot d’Axel sur le thème « Loi et conscience », partagé lors des deux veillées des 7 et 8 octobre devant le Conseil Constitutionnel.

« Il semble bien qu’il y ait en l’homme, c’est-à-dire en chacun de nous, une instance qui nous justifie, c’est-à-dire qui nous conduit vers le chemin juste. C’est la conscience humaine. Libre à nous, ensuite, de l’écouter ou de l’occulter.

Il est certain qu’aujourd’hui des hommes qui nous gouvernent l’occultent, et que d’autres l’écoutent. Mais nous ne pouvons pas pour autant scinder le monde entre ceux qui écoutent et ceux qui occultent, car ceux qui écoutent n’auront jamais fini d’écouter cette parole qui les habite, et ceux qui occultent n’auront jamais raison de leur conscience.

Tant que nous espérons, nous qui veillons, pouvoir suivre ce murmure continuel, cet appel à la justice et à la vérité qui habite notre cœur, alors nous vivrons. Sinon, nous mourrons du même cynisme qui tue nos adversaires d’un temps, de l’illusion de vivre, d’un plaisir éphémère sans joie profonde.

La loi est une autre instance justificatrice qu’une société se donne en vue d’une plus grande justice. Mais la loi est fragile, elle est toujours moins complexe que la nature de l’homme, que ce réel intérieur. Même les bonnes lois posent des cas de conscience à l’homme. La loi possède toujours des carences, car l’homme et la nature seront toujours infiniment plus complexes qu’elle.

La conscience, c’est justement cette complexité, cette richesse que l’homme porte en lui et dont il essaye d’entendre le murmure pour savoir ce qu’il doit faire. Dans une société chaotique où le hurlement permanent des commentateurs publics empêche les hommes de s’entendre, il devient si difficile d’écouter ce murmure que certains en viennent à croire qu’il n’existe pas.

L’homme sans conscience, sans morale, sans éthique, serait pour ceux-là l’homme libre. Pour cacher cette pensée, on préfère nous expliquer que chaque individu est auto-normé, que chacun possède sa propre morale. Comment un message si simple sur l’homme, un mensonge si grossier peut-il être proféré à longueur de journée sur toutes les ondes obscures de notre temps ? Comment un peuple tout entier peut-il désespérer de faire savoir que sa conscience lui dit le contraire de ce que disent ses lois ? Grâce à l’absence de lien social et d’engagement personnel, grâce au désespoir et à l’égoïsme ambiant.

L’enfer s’installe lorsque chacun croit pouvoir construire seul son petit paradis sur ses sentiments et désirs individuels. La société ultra-violente que nous voyons s’édifier jours après jours, dans ses rapports économiques, sociaux, familiaux, religieux, est une société d’hommes qui ont étouffé leur conscience et se satisfont de l’assouvissement de leurs désirs au détriment, consciemment pour partie, du bien commun.

Avec quelques dizaines de Veilleurs, dans quelques dizaines de veillées, nous nous battrons toujours au nom de notre conscience, pour interpeller ceux qui font nos lois en mettant nos consciences de côtés et, pire, en mettant parfois leur conscience de côté. Nous leur conjurons d’oublier les théories déshumanisantes de Karl Marx, qui a fait de la matière le moteur de l’histoire. Urs von Balthasar fait de l’amour la force immatérielle de l’Homme. La conscience guide en chacun de nous cette force immatérielle qu’est l’amour.

Ma conscience m’a mené ici une nouvelle fois, je suis toujours prêt à affronter les mensonges et les humiliations des machineries politiques et médiatiques. Je crois que l’homme libre est celui qui écoute et obéit à sa conscience ».

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